Le singe mena la lionne chez l'hyène. Le lièvre était en train de jouer de sa diouroukelé, une guitare à une corde. Il chantait en même temps et le siéménéouâra, le grand chat de la
brousse, répondait à ses questions en chantant lui aussi.
« Quelle est cette peau ? demandait le lièvre.
— C'est, répondait le siéménéouâra, la peau de telle bête que notre chef a dévorée !
— Et celle-ci ?
— La peau de tel autre animal englouti par notre chef. »
À l'entrée de la lionne, tous les sujets de l'hyène, épouvantés, voulurent prendre la fuite.
« Que nul ne bouge ! gronda la lionne, ou j'étrangle tout le monde. »
« Continue ! ordonna la lionne au lièvre qui avait interrompu son chant, continue si tu ne veux pas que je te mange ! »
Le lièvre reprit alors « Quelle est cette peau-là ? » Pas de réponse ! « Quelle est cette peau-là ? » Personne encore ne répondait.
« Passe-moi ta diouroukelé », dit alors la lionne. Elle se mit à jouer et chanta elle-même les questions : « Quelle est cette peau-là ? Réponds-moi, lièvre, toi qui interrogeais tout à l'heure ! »
Et le lièvre répondit : « C'est la peau du zèbre dont notre chef a fait sa proie… C'est la peau de la biche que notre chef a dévorée… »
Arrivée aux peaux des trois lionceaux : « Quelles sont ces peaux ? gronda la lionne.
— Ce sont, dit le lièvre, des peaux de mmmm.
— Qu'appelles-tu des peaux de mmmm ? Ça n'existe pas ! Quelles sont ces peaux encore une fois ? Dis-le-moi distinctement, ou je te brise les reins.
— Ce sont les peaux de tes petits ! » murmura le lièvre secoué de frissons d'épouvante.
À ces mots, la lionne, au comble de la fureur, étrangla les animaux présents les uns après les autres et se réserva l'hyène pour le dessert.
Le carnage terminé, la lionne sortit et, rencontrant les bêtes de la brousse, leur commanda d'aller, chacune de son côté, lui chercher à manger. Et toutes revinrent avec des victuailles : le lièvre avait volé pour elle des arachides ; le chat lui apportait des poulets dérobés ; le singe, des tomates… Seul le bouc n'avait rien trouvé.